Où sont passés les Noëls d’antan ? Tels ceux que les générations qui ont connu « La Belle Époque » (*) se remémorent, non sans nostalgie du passé. Lorsque les lumières brillaient, qu’il suffisait de se souhaiter une bonne année pour y croire. Nostalgie du « Chriskindelsmärik » du « Bröjel », forcément authentique, lorsque Strasbourg ne prétendait pas encore être Capitale de Noël. On en oublierait presque les retombées de cette incontestable réussite économique.

Ces dernières années, nos certitudes ont vacillé. Un terroriste a semé la mort et le désespoir, endeuillant la ville en plein marché de Noël. Puis le Covid nous a ramené à une fragilité que les progrès de la médecine avaient occultée. Encore pouvions-nous espérer dans un vaccin qui a tenu peu ou prou ses promesses.

Depuis le 24 février et l’agression de l’Ukraine par la Russie de Poutine, l’inquiétude a pris une forme plus insidieuse. Porté par la foi dans une Europe élargie, nous n’étions pas préparés à une nouvelle guerre sur le continent européen. Que celui ou celle qui n’a jamais craint un embrasement généralisé lève la main…

Nous ne sommes toujours pas préparés aux conséquences sur nos économies et notre mode de vie. La sobriété énergétique va s’imposer à tous, même si les gouvernements successifs ne peuvent se dédouaner de leurs responsabilités dans la pénurie annoncée. Mais qui osera se plaindre d’un confort moindre, alors que les Ukrainiens doivent survivre sans eau, sans électricité, et sans chauffage ?

Il est presqu’étonnant de voir des milliers de visiteurs se presser dans les allées du marché de Noël. Une façon de retourner à l’enfance rêvée, d’oublier pour quelques heures les menaces sur nos têtes, de conjurer le sort. Pour autant, est-ce pour ne pas gâcher la fête que la place faite aux Ukrainiens reste discrète ? Strasbourg capitale européenne aurait pu poser un signe pour dire à ceux de là-bas et d’ici, qu’on ne les oublie pas. Certes, l’an prochain, l’Ukraine sera « pays invité ». À condition de « Résister » jusque-là.

 

Yolande Baldeweck
Journaliste
yolande.baldeweck@orange.fr

(*) Franz-Olivier Giesbert en fait un tableau plus nuancé (Grasset).

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