Lundi 28 avril 2025, s’est tenu le debrief en conférence des élections législatives allemandes. À l’occasion de cet alliage entre politique et média, le club de la presse de Strasbourg a fait appel à deux journalistes d’exceptions: Véronique Barondeau, responsable du bureau d’Arte à Berlin et Robert Schmidt, journaliste indépendant chez WeReport. Les échanges furent passionnants, entrelaçant sujets d’actualités, expériences professionnelles et conviction personnelle.

Retour sur le dispositif d’Arte pour les élections allemandes

Arte a mis en place un dispositif exceptionnel pour couvrir les élections, avec des journalistes sur le terrain dans les QG des principaux partis et des émissions spéciales en plateau, permettant une analyse à la fois nationale et européenne.

Deux soirées spéciales ont été diffusées : l’une axée sur les résultats et les réactions politiques en Allemagne, l’autre sur la place de l’Allemagne en Europe et ses conséquences pour l’UE.

Une campagne électorale courte et sous tension

La campagne a été exceptionnellement brève en raison d’une dissolution tardive, concentrée sur deux mois d’hiver, cett brièveté a accru la pression sur les partis et les candidats.

La coalition sortante était attendue en difficulté, notamment le FDP (libéraux) qui espérait jouer un rôle pivot mais a échoué à revenir au Bundestag.

Les Verts ont tenté de se démarquer, sans grand succès, tandis que le SPD (sociaux-démocrates) n’a pas su regagner la confiance.

Percée de l’extrême droite et recomposition politique

L’AFD (extrême droite) a confirmé sa progression, notamment dans l’Est où elle atteint des scores records (jusqu’à 46% dans certains Länder), suscitant un véritable choc même si la tendance était largement annoncée

La forte mobilisation démocratique, en particulier des jeunes, a permis à Die Linke (gauche) de faire son retour au Parlement, atténuant en partie la poussée de l’extrême droite.

D’autres partis, comme le BSW (scission pro-russe), restent sous la barre des 5% et donc non représentés, ce qui pose la question de la représentativité.

Analyse médiatique : France vs Allemagne

Les médias français ont été jugés peu nuancés dans leur couverture, se concentrant surtout sur la montée de l’AFD, alors que la réalité allemande est plus complexe, marquée par une diversité de courants politiques.

En Allemagne, les débats politiques sont plus ouverts et moins polarisés, avec une tradition de discussion publique et de formats télévisés où les représentants de différents partis échangent directement.

L’éditorialisme domine en France, avec moins de place pour le documentaire et la confrontation directe d’idées.

Les grands axes de la nouvelle coalition

La feuille de route gouvernementale met l’accent sur la relance économique (allègements fiscaux pour entreprises et particuliers, baisse du coût de l’énergie) et sur la question migratoire (contrôle renforcé des frontières, durcissement des conditions d’accès à la nationalité, limitation du regroupement familial).

L’immigration reste un sujet central, à la fois pour répondre à la pression de l’extrême droite et pour répondre aux besoins du marché du travail, dans un contexte de vieillissement démographique et de pénurie de main-d’œuvre.

Le sentiment d’insécurité, de déclassement, et la frustration dans l’Est du pays alimentent les tensions et la montée de l’AFD, avec une sous-représentation persistante de cette région au niveau politique et économique.

Nominations ministérielles et signaux politiques

La nomination d’un ministre des Finances originaire de l’Est est perçue comme un geste pour mieux représenter cette région marginalisée et s’attaquer aux inégalités.

le nouveau ministre des Affaires étrangères affiche une ligne conservatrice, marquant un retour à une Allemagne forte, plus autonome sur la scène européenne et internationale, notamment vis-à-vis de la Russie et des États-Unis.

Ainsi, les élections allemandes confirment une recomposition politique profonde, avec l’affaiblissement des grands partis traditionnels, la montée de l’extrême droite, et une forte attente de réponses concrètes sur l’économie et l’immigration. Le paysage médiatique et politique allemand se distingue lui aussi par une plus grande ouverture au débat public et une diversité de points de vue, en contraste avec la polarisation française. L’Allemagne prévoit de se confronter à des grands défis notamment la restauration et la confiance plus précisément à l’est et de trouver un équilibre entre fermeté et ouverture, tant sur le plan économique que migratoire.

 

Lucie Mauguin, stagiaire

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