rédacteur en chef Agence de presse EST INFO TV
jacques.rieg@estinfo.tv
– Quel est votre état d’esprit après 4 semaines de confinement ?
Chacun apporte sa réponse, en fonction de ses craintes, pour lui et pour son entourage.
Professionnellement et collectivement, les journalistes d’Est Info TV ont tous répondu présent. Depuis la fin du mois de février, depuis le 1er jour, depuis le 1er cas de Covid 19 dans le Haut-Rhin. Les uns après les autres, jamais ensemble, les binômes de journalistes se sont rendus à Bourtzwiller, puis dans les hôpitaux de toute l’Alsace. Mulhouse, Colmar, Sélestat, et Strasbourg dans une moindre mesure. Pareil avec quelques jours de décalage pour le bureau de Metz puis celui de Dijon. Après les hôpitaux, il y eu très vite les EHPAD. Les 1ers décès nous ont vite fait comprendre l’horreur de la situation. Confinés dans des établissements mal préparés, pas équipés, mais avec le Covid à l’intérieur…
3 journalistes – 2 à Metz et un à Dijon- ont présenté des symptômes suffisamment évocateurs pour que le médecin les mette en quatorzaine. A ce jour ils vont bien, heureusement.
– Comment s’est organisée votre rédaction ? Comment travaillez vous ?
En prenant le maximum de précautions. Nous ne croisons plus les équipes, une seule travaille en même temps dans chaque bureau. Le matériel est désinfecté à chaque sortie. Il a fallu se procurer des masques, FFP2 dans les cas de contacts potentiellement dangereux, chirurgicaux le plus souvent. En montage, d’habitude côte à côte, nous devons désormais respecter 2 mètres de distance, et nous portons des masques de protection en permanence. Dans la voiture, c’est un devant, un derrière.
– Les JT de TF1 font des records d’audience. Il faut plus que jamais informer mais aussi trier le vrai du faux. Comment gérez vous les fake news ?
Les JT de TF1 caracolent en tête des audiences, largement devant les autres chaînes. Les téléspectateurs font confiance aux infos données par les JT de TF1.
Le réseau de correspondants de la PQR, sur le terrain depuis 30 ans, n’y est pas étranger. Le public alsacien nous connaît et nous apprécie je crois. Cette confiance existe aussi dans toutes les autres régions de l’hexagone, c’est ce qui fait la puissance et la crédibilité de ce réseau unique en France. Fake news ou pas ? Notre responsabilité est énorme dans ce genre de crises, il ne faut prendre aucun risque. Plutôt attendre le lendemain que de se précipiter, nous ne faisons pas la course.
– Qu’avez vous fait depuis 30 jours que vous n’aviez jamais fait avant ?
Tout a changé ou presque ! Et pas seulement sur le terrain… Lorsque nous rentrons chez nous, nous devons nous déshabiller, laver nos vêtements, laisser les chaussures à l’extérieur, reprendre une vie normale de « confiné à risques ». Je comprends les soignants qui préfèrent dormir ailleurs que dans leur famille, c’est une situation anxiogène que d’alterner périodes de boulot et de repos. Mais une fois qu’on est dans l’excitation que procure le terrain, on oublie et on fait au mieux. Y compris en nous adaptant à la nouvelle donne et aux nouveaux risques : faire des interviews par Skype ou FaceTime avec un témoin qui est peut-être juste de l’autre côté de la rue, cela ne m’était jamais arrivé…
– Un dernier mot ?
Si vous avez l’opportunité de ne pas sortir, profitez-en. Mais préparez-vous tout de même à reprendre une vie normale dans quelques semaines, progressivement. Je suis inquiet pour tous ceux qui n’osent plus du tout sortir et qui n’ont pas mis un pied dehors depuis maintenant plusieurs semaines. Leur réadaptation à un monde extérieur qu’ils considèrent comme hostile voire potentiellement mortel ne va pas couler de source.