Appréhension, peur, angoisse…. Elles marchent dans les rues de Téhéran, d’Ispahan, de Racht… elles vont à l’université, au travail ou dans un café rejoindre des amis…. appréhension, peur, angoisse… ces sentiments ne les abandonnent jamais vraiment.

 

Elles vérifient si cette foutue camionnette blanche et verte est dans le coin, elles ferment d’une main leur manteau pour cacher leur T-shirt au cas où… mais au fond, elles savent que c’est vain. Que si on les interpelle, elles devront se battre pour ne pas monter dans le véhicule, pour ne pas être emmenées au commissariat, pour ne pas être humiliées et traitées comme des criminelles pour leur simple tenue vestimentaire.

 

Ce n’est pas le voile, le problème. Ça va bien plus loin qu’une simple tenue, des cheveux qui dépassent, un maquillage trop marqué ou du vernis sur les ongles. C’est pour dire : « N’oublie pas où tu habites, n’oublie pas qui décide, n’oublie pas cette Révolution d’il y a 40 ans ». On leur demande de sacrifier leur identité, leur personnalité…qu’elles cessent d’être elles au nom d’une idéologie –  obsolète pour la majorité de la société. C’est un discours de domination. Sur les femmes, sur la société.

 

L’Iran est en deuil, mais l’Iran est surtout indignée, en colère, fatiguée par tant de violence en son sein. Aujourd’hui c’est Mahsa Amini, hier c’était Neda Agha-Soltan ou encore Sahar Hudayary et combien d’autres – restées anonymes –  qui font partie de cette jeunesse éduquée et sacrifiée. Des filles et des garçons contraints à la désobéissance civile quotidienne simplement pour vivre et qui paient à un moment donné, le prix d’un instant de liberté volée.

 

Combien d’autres noms encore devrons-nous pleurer ?

 

Sara Saidi
Journaliste strasbourgeoise
Ancienne correspondante en Iran de 2016 à 2019
Auteure de « Portrait de Téhéran » Hikari Editions, 2018
sarasaidi5@yahoo.fr

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