Il n’y a pas de guerre en Ukraine. Juste une « opération militaire spéciale de dénazification ». L’autre soir, sur BFM, le porte-parole de l’ambassade russe à Paris est resté droit dans ses bottes. Tant pis pour les villes dévastées par les bombes, les morts enfouis sous les ruines, les millions de déplacés de l’intérieur, les 4 millions de femmes, enfants et personnes âgées, réfugiés dans l’Union européenne.

Sans oublier tous ceux qui restent à tout prix ou ne peuvent quitter leur quartier ou leur village où ils se terrent sans eau, ni nourriture, dans le froid et la neige. Marioupol, et d’autres villes transformées en un immense camp de concentration à ciel ouvert, avec des maires qui forcent le respect, même s’ils sont impuissants.

Grâce au sang-froid des envoyés spéciaux, qui font mentir  la propagande du Kremlin, nous suivons l’escalade de la terreur en direct. Avec ces images insoutenables de corps criblés de balles, témoignages d’exactions – des « crimes de guerre » ? – perpétrées par l’armée russe. Mais le risque est grand pour nos confrères de servir de cibles.

Six reporters ont été tués, onze autres blessés et combien de journalistes ukrainiens menacés, enlevés puis relâchés, avec des pressions exercées sur leurs familles. Des histoires de vie et de mort glaçantes à lire sur le site de Reporters sans frontières. Et que dire des journalistes russes qui risquent quinze ans de prison s’ils osent parler de « guerre » ? Ils  n’ont d’autre choix que de se taire ou tenter de partir.

Nous n’avions pas vu les champs de ruines de Grozny, ni d’Alep. Aujourd’hui, la « guerre totale » est à nos portes, dans des villes européennes qui ressemblent aux nôtres. Nous ne pourrons pas dire que nous ne savions pas.

Yolande Baldeweck
Journaliste
Correspondante du Figaro

 

 

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